Opinions divergentes
Hier, en fin de matinée, une collègue m'a rapportée une conversation qu'elle avait eue avec un fournisseur. Cette dame se trouve être l'épouse de quelqu'un qui m'a causé beaucoup de tort et de problèmes sur les trois ou quatre dernières années, l'une des rares personnes à qui je pourrais bien être capable de cracher mon mépris à la figure, si l'occasion m'en était donnée un jour. Il semblerait que sa femme ne le surpasse pas en termes d'intelligence : elle s'est en effet mis en tête de mélanger relations professionnelles et personnelles, en indiquant hier à ma collègue qu'elle désapprouvait mon éventuelle implication dans un dossier pour laquelle on sollicitait ses services. Quand ma collègue lui a demandé pourquoi, elle a répondu, choquée et dédaigneuse, "mais, elle est divorcée ?!?". Non, pas encore (malheureusement). Mais j'ignorais que le divorce faisait de vous une paria !
Je n'ai aucune estime pour ce couple, mais les paroles et les idées qu'elles cachaient (mal) m'ont blessées malgré tout, et j'ai passé le reste de la matinée et ma pause déjeuner à ressasser mille idées pénibles dans un petit coin gris de ma tête.
Et puis, la vie avance, et les instants se suivent sans se ressembler. En début d'après-midi, un coup de fil est venu adoucir ma peine et apaiser ma colère, en relativisant la remise en cause dans laquelle les mesquineries du matin m'avaient plongée : un membre de l'équipe de direction, récemment arrivée dans notre fourmilière, a fait part de son admiration pour le travail que je lui avais transmis ; la dame s'est même payé le luxe de répondre par l'affirmative au big boss qui lui demandait si elle avait bien reçu le dossier, en ajoutant qu'au vu de la qualité de celui-ci, il était d'ailleurs clair que ce n'était pas le chef du service qui s'en était occupé...
Ca ne changera pas la face du monde : mon chef continuera à masquer son incompétence de son mieux, en se cachant derrière une équipe de petits nègres trop dociles ; le big boss n'interviendra pas pour recadrer un peu le fonctionnement de notre service ; et je ne deviendrai pas non plus calife à la place du calife, ce que je ne souhaite d'ailleurs surtout pas. Mais quand même : ça fait du bien, parfois, d'entendre des personnes marquer leur appréciation pour le travail que vous accomplissez, et même s'étonner que vous n'ayez pas plus conscience de votre valeur...
Illustration : "Dos à dos" : conversation.
sculpture de Pauline Baste-Morand.